Commission ou prime sur objectif: comment choisir?
Pas de rémunération commerciale digne de ce nom sans une partie de variable. Mais quel variable? Faut-il privilégier la commission, les primes ou bien faire un mix des deux pour optimiser la rémunération de vos vendeurs?
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Doris Gautronneau, directeur support vente, formation et développement de Xerox France
«Grâce aux commissions, nos vendeurs font décoller leur salaire!»
Prime ou commission? Laquelle de ces deux approches de calcul du variable est la plus adaptée à votre entreprise? «La tendance est davantage à la prime et au bonus qu'à la commission, assure Thierry Magin, directeur associé de MCR, cabinet de conseil en ressources humaines et rémunération. Toutefois, le choix doit se faire en fonction de la nature du circuit de distribution et de l'approche commerciale, et non d'une quelconque mode.» Car les deux principes d'attribution du variable actionnent des leviers de motivation différents, répondent à des stratégies distinctes et à des règles de calcul et d'attribution très éloignées. La commission? Elle est liée au business pur et est rarement plafonnée (mais pourrait l'être). Elle se calcule d'après un pourcentage de la marge ou du chiffre d'affaires et se déclenche dès le premier euro vendu. Alors que la prime Cou bonus) fait référence à des indicateurs souvent qualitatifs et repose sur l'attribution d'une «prime cible» (un montant plafonné) à objectifs atteints.
Dans un réseau avec une forte culture vente et des commerciaux entièrement responsables de l'acte de vente, les directions optent souvent pour un système de rémunération faisant la part belle à la commission. C'est le cas chez Xerox France. L'essentiel du variable (75%) est versé sous forme de commission non plafonnée et liée au chiffre d'affaires. Parallèlement, pour que chaque vendeur ait une idée de ce qu'il peut percevoir chaque mois et pour mobiliser chacun autour d'un but très concret, Xerox détermine en amont un objectif commercial individuel et calcule le montant de la commission mensuelle associée. Montant qui fluctue dans l'année en fonction des résultats de chacun.
Le variable doit couronner la performance
Ce système est-il parfait? Sans inconvénient? Bernard Marty, consultant expert chez Hay groupe, société spécialisée dans les systèmes de rémunération, est très critique à ce sujet. «Nous le déconseillons dans toutes nos préconisations, pour y substituer des systèmes déprimes. S'agissant d'un commercial, le rôle du fixe est de rémunérer le volume de ventes «attendu». Si vous y ajoutez une commission versée dès le premier euro vendu, alors pour une même vente, le commercial passe deux fois à la caisse! C'est encore plus vrai lorsque l'entreprise accorde un fixe élevé. Le système des primes, déclenché à partir d'un certain niveau de performance, est plus judicieux. Il permet alors de récompenser l'effort et l'excellence.» Dans ce cas, la direction de Xerox aurait-elle fait un mauvais choix? Pas si sûr. D'abord parce que si le fixe des commerciaux représente en moyenne en France entre 70 et 75% de la rémunération totale, la direction de Xerox, elle, fait le choix d'un fixe relativement «faible». «Selon le profil des vendeurs, il oscille entre 55 à 60% du salaire total», indique Doris Gautronneau, directeur support vente, formation et développement chez Xerox. L'effet redondant fixe et commission est donc limité.
Par ailleurs, la commission est un incontestable moyen de booster le salaire des commerciaux: «Notre direction envoie un message clair aux vendeurs: «chez nous, vous pouvez faire décoller votre variable». C'est un véritable outil de motivation!» Enfin, pour faire de cette commission un outil de management, la direction de Xerox introduit des accélérateurs ou des ralentisseurs en fonction des priorités de l'entreprise. «On peut ponctuellement introduire un accélérateur sur une ligne ou une gamme de produits ou encore encourager les ventes réalisées via notre offre de leasing interne, détaille Doris Gautronneau (Xerox). La commission est versée chaque mois ou bien parie biais d'une avance sur deux mois, alors régularisée le troisième mois.» Sous réserve de proposer un fixe assez bas et de mettre en place des accélérateurs Cou ralentisseurs), la commission va répondre aux attentes de directions commerciales qui veulent mettre l'accent sur les volumes vendus.
Pousser la vente ou être plus qualitatif?
Dans quel cas utiliser les primes? Pour Thierry Magin (MCR), «on opte pour un système de primes (ou de bonus) lorsqu'il s'agit de commerciaux qui vendent des produits techniques ou qui doivent collaborer avec d'autres services pour boucler l'affaire (SAV, ingénieurs, supports techniques...) ou encore lorsqu'on a affaire à des cycles de vente longs.» Autre cas de figure qui appelle la prime: celui des vendeurs en réception d'appels.
De manière générale, l'utilisation de la prime favorise une approche qualitative de la relation commerciale. Elle aide aussi à définir des priorités tactiques comme l'intéressement des animateurs de réseaux de distribution au nombre de recrutements qu'ils effectuent.
Enfin, le principal intérêt technique de la prime par rapport à la commission réside dans le fait que celle-ci va se déclencher uniquement lorsque 80% de l'objectif de chiffre d'affaires est atteint «Elle est versée lorsque le commercial a réalisé une vraie performance», conclut Bernard Marty. Concrètement, à 80% de l'objectif, la prime sera de 2% du salaire fixe, elle sera de 2,2% à 100%, de 2,5% à 120%, etc. «C'est le système que nous préconisons, répète Bernard Marty. Mais il faut pour cela que les rémunérations fixes soient équitables et correctement calibrées selon les différents profils (débutants, confirmés, etc.). Le fixe doit rémunérer de manière juste la mission de chacun. C'est un système que nous avons du mal à mettre en place dans le cadre de fusions par exemple où les systèmes de rémunération sont multiples.» Dans les faits, les entreprises adoptent souvent un système d'attribution du variable de leurs commerciaux qui allie une commission et des primes, ce qui permet de tirer profit des différents indicateurs de performance.
Et Thierry Magin d'ajouter une dernière recommandation: «Quelle que soit la nature de variable, celui-ci doit représenter au moins 20 % du sa/aire total pour être motivant.»
Le témoignage de Grégoire Le Bideau, directeur commercial France d'Ubiqus, société de services dédié aux organisateurs de réunions
«Les primes permettent de piloter les ventes»
Entre commission et primes Ubiqus a décidé de ne pas choisir! La direction a, en revanche, imaginé une formule pour chaque type de vendeurs. Le variable des «chasseurs» purs, dont l'objectif est de gagner de nouveaux clients, se répartit équitablement entre le système de commission et celui des primes. Ici, l'objectif de la direction est de capter de nouveaux clients! «Au-delà de la commission, nous leur attribuons donc des primes dont le montant oscille entre 50 et 150 euros à chaque nouveau client», détaille Grégoire Le Bideau, directeur commercial France. Les «éleveurs» purs, qui accompagnent au quotidien les clients, sont, eux, très intéressés sur leurs ventes. Leur variable est constitué à 80 % de la commission indexée sur le chiffre d'affaires et à 20% de différentes primes. «La commission est là pour les encourager à faire du chiffre. Par ailleurs, nous leur attribuons une prime lorsqu'ils vendent à un client habituel un produit inhabituel ou bien lorsqu'ils font remonter aux chasseurs une information qui permet de concrétiser une commande avec un prospect», explique Grégoire Le Bideau. Enfin, pour les commerciaux d'Ubiqus dont le portefeuille compte aussi bien des clients acquis que des prospects, la direction commerciale a prévu un système qui fait la part belle à la commission, dont le poids atteint environ 90 % du variable.